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La cour Mortureux
A la fin des années 1820, quand l’abbé Angebault acquiert le « Clos Versennes », à part le long de la route de Rennes, l’endroit est peu construit.Le petit château où s’installe la pension Orillard est d’ailleurs une filature, et la rue de la Distillerie n’existe pas, il n’y a que des jardins (c’est d’ailleurs le nom à l’époque de la rue St Stanislas), des prairies, avec des haies.
La proximité de l’Erdre, voie navigable et source d’eau, fait qu’un industriel de la famille Suzur installe une tannerie, et les affaires prospérant, vers 1850, fait bâtir un somptueux hôtel particulier, desservi par la rue nouvellement créée, et l’espace arrière étant occupé par les ateliers en bord de l’Erdre, fait aménager en face des écuries et hangars à voitures, en plus d’un jardin avec fontaine et rocaille. Même pour des bâtiments utilitaires, on fait beau et on ferme l’accès par de hautes grilles soutenues par deux solides piliers de pierre richement sculptés. Le jardin devient mitoyen de St Stanislas qui au fil des achats de parcelles est descendu sur le côteau entre 1850 et 1867.
Au début du 20è siècle, la propriété passe dans la famille Mortureux, jardin et écuries comprises qui deviennent garages automobiles, l’étage grenier à fourrage ne sert plus. Les affaires périclitant, la famille divise et loue le bel immeuble, dont le salon du premier comporte un plafond peint par Puvis de Chavannes, classé bien sûr, c’est dire l’aisance du constructeur. Evidemment les locataires ont accès au jardin et aux garages. D’ailleurs après une centaine d’années de service, un jour la partie supérieure d’un battant de la grille principale tombe sur la tête et l’épaule d’un jeune locataire sans doute un peu brusque avec la centenaire. Le fronton a été ressoudé, on l’espère solidement.
Bien sûr St Stan lorgne depuis longtemps sur ce terrain et ces bâtiments. En vain ; il faut vraiment que la nécessité pousse les Mortureux à enfin vendre à la SCI (à l’époque) St Stanislas en 1950. La construction par phases du bâtiment Jules Verne fait laisser la parcelle au second plan. On vend la fontaine, on plante un ex sapin de Noël en 1955 au milieu de la cour, qui a bien prospéré depuis, on aménage un terrain de basket, on démolit les deux tourelles et on perce un accès pour ce qui est la salle Albert Lechat de l’Apel et l’Amicale, on installe au rez-de-chaussée une salle de télévision et de cinéma et déjà des classes de sixième. La grille ne sert plus, les façades rue se dégradent, mais ça ne se voit pas dans la cour devenue Mortureux ; en revanche on ricane en ville des arrières peu reluisants de St Stan en passant rue de la Distillerie, le pimpant alors bâtiment Jules Verne fait illusion.
Quand Hervé Toumoulin, à la recherche de nouvelles salles, et souhaitant que les « petits » sixièmes aient leur espace à part des plus grands, entreprend de rénover les anciennes écuries pour en faire des salles de classe et un préau, respectueux du passé il garde deux anneaux à tête de cheval sur les murs rappelant l’ancienne destination. Le ravalement est superbe. On aménage aussi une rampe réglementaire pour rattraper la déclivité , et surtout on construit trois salles neuves. A la rentrée 2009, les sixièmes sont chez eux. On est maintenant à six classes de sixième, on atteint les limites avec 190 inscrits, et on a des listes d’attente ! Cette première classe de collège détermine la structure des trois années qui suivent. Mais la grille, les poteaux et les crépis extérieurs restent en l’état, il y a d’autres urgences, même si on y pense toujours.
Et tout arrive pour qui sait attendre, encore retardés par l’épidémie, enfin les travaux de rénovation ont commencé. Par les poteaux, dont des pierres étaient à changer, d’autres à restaurer. Les grilles et enduits vont suivre cet automne. Les vénérables piliers ont été emballés, ultime hommage à Cristo ? pour la durée des travaux. Et avec la réfection du mur de soutènement plus haut, on n’entendra plus les ricanements, mais les murmures d’admiration que mérite tout notre cher Etablissement dans son gigantesque effort de rester grand, beau et au plus haut niveau depuis deux siècles ! On aurait presque envie de retourner en sixième, heureux sont les élèves qui vont faire leur rentrée dans un si somptueux cadre !